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La
drogue et le conflit en Birmanie Un
rapport du TRANSNATIONAL INSTITUTE (TNI) traduit et adapté
par Fanny Guillier pour Info Birmanie
Le texte qui suit est
l'adaptation en français d'un rapport du TNI daté de
décembre 2003. Le rapport original est consultable sur
le site http://www.tni.org/
sous le titre: "Drugs and Conflict in Burma - Dilemna for
policy responses".
C’est l’armée
nationaliste chinoise de Chiang Kai-Shek, le Kuomintang, qui fut
la première à organiser le trafic d’opium dans
les régions frontalières avec la Birmanie, la
Thaïlande et le Laos. Après sa défaite face aux
forces communistes, le KMT s’est retranché dans le
nord de la Birmanie d’où il a mené plusieurs
attaques infructueuses dans la province de Yunnan ; il a donc été
contraint de changer de stratégie et il a commencé à
occupé des zones de l’Etat Shan près de la
frontière thaïlandaise où il a mis en place un
réseau d’échange d’opium qui lui a
survécu. Une épée de Damoclès est
suspendu au-dessus de l’Etat Shan , la zone de production
d’opium la plus importante de Birmanie ; en 2002, la
prohibition de l’opium est entrée en vigueur dans la
région de Kokang et d’ici 2005, la production sera
interdite dans la région Wa. L’application de ces
interdictions est une menace pour les ressources vitales de
quelques 250,000 familles de l’Etat Shan, qui dépendent
de l’économie de l’opium. Les communautés
rurales risquent d’être sacrifiées à
travers l’effort fourni afin de se plier aux pressions
internationales et aux contrôles américains qui
visent à supprimer, dans de courts délais, la
production de drogue, perçue comme une menace pour la
sécurité régionale. En réponse à
ces pressions, les autorités locales et nationales tentent
de s’attirer les faveurs de la communauté
internationale en annonçant des mesures de prohibition
colossales. La nature complexe du problème pose de nombreux
dilemmes et nécessite des réponses politiques
ciblées tant au niveau local qu’au niveau
international afin de permettre au pays d’avancer dans la
voie du développement, de la réconciliation
nationale et de la démocratie. Une diminution constante
et progressive de la production de drogue pourrait avoir un effet
positif sur l’épidémie de HIV en Birmanie, qui
est due, en majeure partie, à la consommation de drogue par
intra-veineuse. Cette réduction permettrait également
de limiter les problèmes liés au trafic de drogue,
comme la prolifération du ya ba (méthamphétamines)
en Thaïlande, la corruption et les conflits de pouvoirs en
Birmanie qui résultent des revenus dégagés
par les groupes armés. L’histoire a montré que
très peu d’acteur du conflit se sont tenu à
l’écart de l’économie parallèle ;
la stigmatisation de l’une ou l’autre des parties est
donc infondée. Pour atteindre à long terme une
diminution de la production, des sources de revenu alternatives
doivent être proposées aux fermiers afin qu’ils
puissent subsister. Or, l’application des délais
fixés ne permettra pas la mise en place d’une
alternative, malgré les efforts de l’UNODC (United
Nations Office on Drugs and Crime) ; la crise humanitaire menace
la stabilité sociale fragile des zones de production. Sans
les ressources adéquates, les effets à long termes
des solutions proposées sont très douteux. Afin
d’assurer le respect de ces promesses en la matière,
la junte risque de renforcer la répression ainsi que les
atteintes aux droits de l’homme et les déplacements
de population. La seule option viable réside dans la
pression internationale exercée sur le régime pour
l’éradication de l’opium ; toutefois, ces
pressions doivent simultanément être accompagnées
d’une aide humanitaire internationale de grande envergure.
La prohibition et l’éradication de l’opium en
Birmanie ne pourra se faire pleinement et sainement que si la
communauté internationale accepte de s’investir
d’avantage en Birmanie.
I.
L’économie de l’opium et l’interdiction
en cours
Le véritable problème
dans les régions Wa et de Kokang, est que l’opium est
la seule culture qui rapporte suffisamment d'argent pour assurer
son transport vers les points de vente. Pour supprimer l’opium
dans ces zones, il faut y implanter des cultures de substitution
suffisamment lucratives pour assurer la survie des populations et
éviter leur migration. Les autorités Wa se sont
déjà imposé une interdiction sur l’opium
qui prendra effet en juin 2005, après la récolte de
printemps ; dans la zone de Kokang, une interdiction est entrée
en vigueur l’an passé. Près de 250,000 foyers
vivant au niveau de subsistance seront privés de la moitié
de leur revenu ou contraint à migrer.
1.
L’économie de l’opium
Derrière
l’Afghanistan, la Birmanie est le deuxième producteur
mondial d’opium, la matière première de
l’héroïne. Près de 90% de l’opium
provient de l’Etat Shan, où 40 à 50% de la
drogue est produit dans les régions de Wa et de Kokang. Les
récents rapports de l’UNODC et du Département
d’Etat américain (USSD) font état
d’importantes diminutions dans la production, de l’ordre
de 23% (UNODC) à 37% (USSD) pour l’année
2003. La décroissance constante des productions ces
dernières années a entraînée des
réactions optimistes au sein de l’UNODC. Le directeur
exécutif a déclaré qu’il y a peu,
cette diminution aurait été impossible mais il a
souligné que les Etats concernés nécessitaient
une assistance régulière afin de substituer à
la culture de l’opium des activités lucratives
légales ; l’Asie du Sud-Est deviendrait alors selon
lui, une source mineure de l’opium d’ici 2008. En
1998, la session spéciale de l’Assemblée
Générale des Nations Unies sur les drogues a fixé
un délai de 10 ans pour éliminer ou réduire
significativement la culture de l’opium d’ici 2008.
Les Etats d’Asie du Sud-Est ont conjointement décidé
d’éradiquer la drogue dans leur région d’ici
2015 ; concernant l’opium, ils ont décidé
d’adhérer au court délai fixé par
l’Assemblée Générale, prévoyant
une réduction de 33% en 2003 et une autre de 66% en
2005. La stratégie anti-drogue de la junte birmane
poursuit donc cet objectif. En 1999, le plan sur 15 ans pour
l’Elimination des drogues narcotiques a été
adopté ; ce plan est divisé en 3 phases de 5 ans
visant à régler les problèmes liés à
la production et à la consommation. Ce plan prévoit
que d’ici 2009, l’Etat Kachin, ainsi que le nord,
l’est et les 2 tiers du sud de l’Etat Shan seront
libérés de la culture du pavot ; la phase finale de
5 ans concerne le sud de l’Etat Shan, ainsi que les Etats
Chin et Kayah. Le régime assure que si l’aide
internationale est effectivement disponible, ce plan pourrait être
conclu plus rapidement que prévu. Entre 1985 et 1988, les
Etats-Unis ont aidé la junte en conduisant des opérations
aériennes d’aspersion des champs de pavot avec
l’herbicide 2,4-D (un des ingrédients de l’Agent
Orange) comme ils l’avaient fait au Guatemala. Le
gouvernement a d’ailleurs créé un Musée
de l’élimination des Drogues où les opérations
d’éradication sont relatées. La stratégie
de contrôle des drogues du SPDC comporte des mesures
répressives très controversées comme le
recensement et le traitement obligatoire de tous les
consommateurs, et les opérations militaires d’éradication
forcée contre les fermiers. Par ailleurs, concernant le
développement alternatif, le gouvernement préfère
instaurer de grandes infrastructures comme des barrages, des
centrales électriques, des ponts ou des usines plutôt
que de véritables projets de développement local
pour les populations touchées.
2. La Birmanie et
le marché global des opiacés
Le marché
global des opiacés a toujours été très
instable à cause des déplacements géographiques
des cultures de pavot. Le déclin de la production birmane
depuis 1997 (après une décennies de stabilité
dans la production) n’est pas uniquement imputable aux
politiques de la junte ou de l’UNODC en la matière.
En plus de mauvaises conditions météorologiques ces
dernières années, le marché des opiacés
a facilité ce déclin : L’héroïne
birmane a été éjectée des marchés
américains et européens. Les saisies effectuées
aux EU ont pu démontrer que les opiacés d’Asie
du sud-est ont été remplacés par ceux
d’Amérique du sud ; en 1993, beaucoup de grandes
villes sur la côte est des EU étaient approvisionnées
à 90% par de l’héroïne provenant d’Asie
du sud-est alors que dans les années 2000, elle ne
représentait plus que 10% de cet approvisionnement. En
Europe, le marché est saturé par les opiacés
afghans. La majeure partie de la drogue produite en Birmanie est
aujourd’hui consommée en Asie du sud-est, au Japon et
en Australie. Très récemment, les mesures de
prohibition dans les régions de Kokang, Wa et de
l’est de l’Etat Shan ont commencé à
influer sur la production ; toutefois, étant donné
la faible dispersion des drogues birmanes sur le marché
mondial, l’impact de ces mesures ne devrait pas être
largement ressenti à travers le monde. La question est
régionale : comment le marché sud asiatique va-t-il
s’adapter à cette diminution ? Des sources indiquent
que des cultures sont d’ores et déjà
développées en Chine pour faire face à cette
réduction ; d’autre part, il n’est pas exclu
que les cultures birmanes soient simplement déplacées
dans le pays. Néanmoins, le trafic trans-régional ne
risque pas d’être interrompu, étant donné
la densité de la production afghane. En réalité,
l’interdiction sur l’opium posée par les
talibans en 2001 fut la seule faille de ce marché depuis de
nombreuses années. La panique provoquée à
cette occasion a certainement poussé les trafiquants
internationaux à surenchérir sur leur concurrents du
sud-est asiatique afin de fournir leur consommateurs européens
; 2 ans plus tard, le marché a été stabilisé.
3. Une transition trop rapide
La principale
inquiétude réside dans le fait que le manque à
gagner laissé par l’éradication des cultures
ne peut être comblé par les moyens de substitution
qui sont insuffisants ; en effet, pour l’année
2002-2003, les autorités birmanes espéraient réduire
la production de 50%. Néanmoins, le représentant de
l’UNODC à Rangoon, plus réservé, a mis
en garde le gouvernement contre une mauvaise transition,
entraînant le pays vers une crise humanitaire certaine. Les
autorités Wa et de Kokang ont décrété
la prohibition du pavot, et pénalisent désormais
toutes les activités liées à la drogue, la
culture, la production, le trafic et la consommation. La
prohibition dans la région de Kokang fut décidée
en 1997, dans le but d’éradiquer l’opium de
cette zone pour la saison 2000-2001. L’éradication
forcée a commencée en 1998, réduisant la zone
cultivée d’un tiers ; la date d’éradication
fut ensuite reconduite à la saison 2002-2003. L’impact
de l’entrée en vigueur de l’interdiction en
2002, est confirmé par la comparaison des récolte de
2002 et 2003. Dans la région de Kokang, une diminution de
60% des hectares cultivés est constatées ; dans tout
le nord de l’Etat Shan, c’est une réduction de
50% des hectares qui a été enregistrée, et
particulièrement dans les villes jugées comme cibles
prioritaires par le SPDC pour la première phase de 5 ans.
Néanmoins, d’importantes hausses de production ont
été constatées dans le nord de la région
Wa ainsi que dans le centre de l’Etat Shan, ce qui laisse
préjuger d’un déplacement des cultures dû
aux fortes pressions exercées dans le nord de l’Etat
Shan. Pour la région Wa, la loi inclut une close qui
précise que les cultures des fermiers seront détruites
s’ils ne s’adaptent pas d’ici 2005 ; des peines
d’emprisonnement sont également prévues pour
augmenter la pression exercée sur les récalcitrants.
En effet, de nombreux cas de fermiers emprisonnés ont été
rapportés, même s’il n’existe pas de
chiffres officiels pour mesurer cette répression. Selon
M.Lemahieu, représentant de l’UNODC à Rangoon,
la réduction des cultures de pavot dans la région de
Kokang est drastique mais la situation des fermiers et de leurs
familles est alarmante ; la crise humanitaire dans cette région
est imminente. Près de 30% des parents retirent leurs
enfants de l’école pour revendre le matériel
scolaire ; en effet, 80% des foyers qui cultivaient l’opium
utilisaient ces revenus pour acheter du riz. Les 500$ gagnés
annuellement servaient à nourrir la famille et assurer des
besoins basiques tels que la santé ou l’éducation.
Aujourd’hui, les prémices de la famine apparaissent
et le Programme d’Alimentation Mondial a récemment
commencé à apporter en urgence une assistance afin
de distribuer du riz aux fermiers qui cultivaient le pavot, en
partenariat avec de nombreuses ONG. Les problèmes constatés
dans la région de Kokang ne sont rien comparés à
ceux qui risquent de voir le jour sur le long terme ; par
ailleurs, la situation est en phase de se répéter
dans les collines très peuplées de la région
Wa si le problème n’est pas traité
différemment.
4. Le marché du Ya Ba
On
entend souvent l’argument selon lequel le SPDC et les
autorités Wa souhaitent éradiquer la production
d’opium car ils préfèrent désormais
produire des méthamphétamines qui sont plus
rentables. En effet, dans le sud-est asiatique, les
Amphetamine-type Stimulants (ATS) sont devenues une drogue de
premier choix ; la Thaïlande connaît une grave crise de
prolifération de ces tablettes appelées Ya Ba .(
médicaments qui rendent fou) A travers le monde, les ATS
représentent le marché illicite qui connaît
l’expansion la plus rapide. Les éléments
chimiques de base, les éphédrines, sont produites en
Chine et en Inde pour un coût dérisoire ;
contrairement à la cocaïne et l’héroïne,
dont les productions sont limitées par la géographie
et le climat, les drogues synthétiques peuvent être
produites n’importe où. C’est pourquoi les
laboratoires de production ont poussé comme des champignons
en Birmanie, et particulièrement sur la frontière
thaïlandaise pour répondre à l’énorme
demande ; jusqu’en 1997, des usines existaient dans le
centre de la Thaïlande mais se sont délocalisées
avec le durcissement dans l’application de la loi. Il n’y
a aucun doute sur l’existence de ces laboratoires en
territoire Wa, qui sont parfois même protégés
par les autorités Wa et le SPDC lui-même. Environ 700
millions de tablettes quittent la Birmanie tous les jours à
destination de la Thaïlande ; d’énormes profits
sont dégagés et toutes les autorités locales
sont largement corrompues. La production d’ATS est un marché
très concurrentiel ; les réseaux bougent facilement
et de nouveaux groupes apparaissent constamment. La dynamique est
très différente de celle de l’économie
de l’opium.
5. Le développement alternatif
dans la région Wa
En 1998, sous l’égide
de l’UNODC le Programme de Contrôle des Drogues des
Nations Unies (UNDCP) a commencé le projet de développement
alternatif de la région Wa (WADP) avec l’objectif
d’assister les autorités Wa dans la transition vers
une région sans pavot d’ici 2005. Le projet vise à
améliorer la sécurité alimentaire, assurer
des revenus de substitution et améliorer les conditions de
vie en matière de santé et d’éducation
pour quelques 6250 familles réparties dans 4 communes. Ce
projet qui doit se prolonger jusqu’en 2005 représente
le plus gros effort en terme de développement alternatif de
toute la Birmanie, bien que les fonds disponibles soient largement
inférieurs aux sommes requises. Selon le rapport
d’évaluation, les obstacles rencontrés par le
WADP sont sans précédents. En 2000, le projet a même
été suspendu après que des brigades de
sécurité Wa ait pris en otage une partie de l’équipe
travaillant sur le projet dans un centre de
désintoxication. Initialement, les autorités Wa
n’étaient intéressées que par les
infrastructures construites pour la bonne marche du projet comme
les routes. Des tensions sont apparues lorsque les populations
furent associées au projet de développement, à
travers une approche participative : les autorités ont
alors craint une baisse de leur influence dans la région ;
finalement, après de longues négociations, les
activités de développement au sein des communautés
n’ont pu débuter que dans 4 villages. C’est
d’ailleurs pour l’absence d’une approche
participative sérieuse que le projet fut vivement critiqué
lors de l’évaluation de 2003 ; toutefois, ces
premières étapes ont permis d’instaurer une
certaine confiance de la part des autorités Wa qui ont
autorisé les équipes du projet a étendre
l’approche participative à 15 villages cette
année. Initialement, l’UNDCP soutenait l’idée
d’un délai clairement fixé pour l’éradication.
D’ailleurs, l’annonce de la prohibition du pavot dans
la région Wa dès 2005, a fait suite à une
réunion tenue entre des représentants Wa, des
membres du régime, et des membres de l’UNDCP en juin
1995 où les autorités Wa ont accepté le
projet à condition de percevoir une aide de la communauté
internationale. Aujourd’hui, aux vues des circonstances, les
coordinateurs du projet ne sont plus d’avis d’imposer
une interdiction avant que les moyens d’un développement
alternatif ne soient mis en place pour assurer son succès. En
effet, la prohibition prévue pour 2005, limite la portée
du projet de développement alternatif qui n’en a plus
que le nom. La réduction des cultures de pavot est assurée
par les autorités qui utilisent des moyens coercitifs et
l’imminence de l’interdiction a réduit les
objectifs du projet qui apparaît désormais comme une
simple mission humanitaire d’assistance aux populations
dépendantes de l’économie de l’opium. La
réussite du projet d’origine nécessite,
paradoxalement, que les critères de contrôle
internationaux soient allégés, que les délais
soient prorogés et que l’idée d’une
tolérance zéro soit révisée. D’autres
contradictions apparaissent, notamment à travers la
politique de relocation forcée ; en effet, les ressources
du nord de la région Wa ne peuvent pas assurer la survie
des populations si la culture de l’opium y est interdite.
Ainsi, les autorités ont ordonné le déplacement
de 40,000 à 50,000 personnes vers la frontière
thaïlandaise et la zone du WADP. Le projet de l’UNODC,
bien qu’opposé à ces mesures, n’a pas pu
les empêcher et tente aujourd’hui de limiter la portée
humanitaire de tels déplacements. Le projet est donc
limité à ces missions les plus basiques : augmenter
la production de riz et améliorer les conditions de santé
et d’éducation. La portée en est très
limitée car le projet n’est déployé que
sur une infime partie du territoire : 28 villages sur 328 peuvent
en bénéficier ; cela ne représente que 150
hectares de pavot. Même le Comité Central pour le
Contrôle des Abus de Drogue du SPDC (CCDAC) estime que la
date butoir de 2005 pour la région Wa est très
ambitieuse et dangereuse pour les populations rurales qui auront
beaucoup de mal à s’adapter ; le SPDC va même
jusqu’à suggérer que la prorogation du délai
de quelques années serait toujours en accord avec les
objectifs nationaux. Les autorités Wa qui sont elles même
conscientes des risques encourus, considère la prohibition
comme le seul moyen d’être accepté par la
communauté internationale ; de plus, elles sont confiantes
en l’aide internationale, à travers le projet UNODC
dont le futur au-delà de 2005 est pourtant incertain. Il
est clair que la prohibition se ferra comme prévue.
Cependant, les autorités vont au devant de difficultés
supplémentaires : plus les cultures sont détruites,
plus les prix du pavot augmentent ; le risque est que la seule
manière d’appliquer cette interdiction sera bientôt
l’éradication forcée. La portée de la
prohibition dépendra alors de la puissance de la répression
exercée et de la confiance des populations dans les projets
de développement. Finalement, aucun bienfait ne pourra
être retiré d’une telle prohibition : ni pour
les populations, ni pour la communauté internationale qui
verra les zones d’approvisionnement se reconstituer, ni pour
le SPDC ou les autorités Wa qui n’obtiendront pas la
reconnaissance politique escomptée en cas de crise
humanitaire.
6. Les " rois de
l’opium "
En réponse à une
rébellion dans l'Etat Shan un an après le coup
d’Etat de 1962, Ne Win a introduit le programme Ka Kwe Ye
qui autorisait la constitution de milices locales pour combattre
les insurgés, en échange d’un contrôle
relatif sur leur territoire ; la plupart de ces milices ont été
largement impliquées dans le trafic d’opium, ce qui
n’a eu pour conséquence que d’augmenter
l’instabilité dans l’Etat Shan. Les plus
célèbres de ces milices étaient dirigées
par Lo Hsing-han dans la région de Kokang et par Khun Sa,
dans le nord de l’Etat Shan. Quand Ne Win abandonna ce
programme en 1973 Lo Hsing-han rejoignit clandestinement la Shan
State Army qui s’allia également avec la Shan United
Army (SUA), clandestine depuis l’arrestation de Khun Sa en
1969. Ces 3 forces ont réémergé un peu plus
tard près de la frontière thaïlandaise, qu’ils
considéraient comme le point névralgique des
récoltes d’opium ; ces terres furent mises en vente
pour la communauté internationale (pour leur destruction)
en échange d’une assistance. Après de longues
délibérations, les EU refusèrent l’offre.
Lo Hsing-han fut arrête par les autorités
thaïlandaises et extradé à Rangoon, avant
d’être utilisé, en 1989, comme intermédiaire
dans les négociations de cessez-le-feu. Khun Sa fut libéré
de prison en 1973 et devint le nouveau " roi de l’opium
". La SUA qu’il dirigeait, est devenue l’une des
armées les plus puissantes basée à la
frontière thaïlandaise, après avoir forgé
(ou forcé) de nombreuses alliances. Dans les années
1990, l’armée de Khun Sa s’est rebaptisée
la Mong Tai Army et contrôlait de vastes zones frontalières.
En janvier 1996, suite à de lourdes pressions, Khun Sa
invita l’armée birmane dans ses quartiers généraux
pour sa reddition.
7. Responsables ou
bouc-émissaires
Après la reddition de
Khun SA et de la MTA (Mong Tai Army), l’USWA (United Wa
State Army) a été diabolisée par les médias
et les Etats Unis comme étant l’armée la plus
impliquée dans le trafic d’opium et de
méthamphétamines au monde. A contrario, ses membres
sont considérés comme étant les
narcotrafiquants les mieux armés du monde. Bien que les Wa
ne soient pas innocents, les politiques du trafic de drogue sont
compliquées et tous les acteurs en Birmanie sont impliqués
d’une manière ou d’une autre ; les Wa ne
contrôlent pas les échanges qui sont assurés
par des réseaux chinois qui furent instaurés par le
Kuomintang. Des membres de l’USWA reconnaissent que leur
organisation détenait des raffineries d’héroïne
et des usines d’amphétamines jusqu’en 1998 et
que les autorités centrales prélevaient des taxes
sur le trafic ; toutefois ils affirment que ces activités
ont cessé et sont désormais interdites sur tout leur
territoire. Ainsi l’UNSWA se considère comme
injustement accusée pour le trafic qui persiste dans la
zone frontalière et compte sur l’application de la
prohibition pour redorer son blason aux yeux de la communauté
internationale. Selon Even Yawd Serk, membre de la SSA South (Shan
State Army South), il ne faut pas accuser le peuple Wa pour les
activités menées par certaines individualités
; ils ne sont que des boucs-émissaires alors que les
bénéfices profitent au SPDC et aux chinois. L’idée
selon laquelle des gangs chinois sont dissimulés derrière
ce trafic est également partagée par le SPDC et les
autorités thaïlandaises. Malgré l’ambition
officielle du SPDC d’éradiquer la drogue sur son
territoire, son implication dans le trafic est évidente, au
moins au travers de la corruption. Par ailleurs, la réintroduction
de l’argent de la drogue dans l’économie
formelle a considérablement augmenté depuis 1990, et
selon un rapport de l’USSD, le blanchiment d’argent en
Birmanie est un facteur déterminant de l’économie
birmane. Face à la complexité de la situation
birmane, la responsabilité du trafic est habituellement
rejetée sur les " rois de l’opium " ou sur
les " narco-armies ". Il est plus facile pour les
agences américaines ou celles des Nations Unies ou encore
pour le gouvernement thaïlandais d’accuser ces "
bandits " plutôt que de mener une enquête
sérieuse qui, à coup sûr, démontrerait
une forte implication du pouvoir.
II.
Un débat politisé : la divergence des
positions
Alors que les aspects humanitaires du
problème de la drogue sont clairement établis, sa
dimension politique est souvent ignorée ; pour certain, il
est nécessaire que des réformes politiques précèdent
l’éradication des cultures et des trafics. En tout
état de cause, l’important est que l’action
menée dans ce domaine n’occulte pas le besoin de
réformes politiques nationales ; toutefois, actuellement,
le problème des drogues représente un frein au
processus de transition. Les réponses apportées
par la communauté internationale concernant les changements
politiques et la réconciliation nationale sont diverses.
Alors que les Etats Unis, l’Union Européenne et les
autres états de l’ouest prônent une politique
d’isolation et de sanctions, les états membres de
l’ASEAN prônent un engagement ciblé pour
permettre le changement. L’échec de la communauté
internationale, qui ne parvient pas à s’entendre sur
une position commune, a également des répercussions
sur le contrôle des drogues en Birmanie.
1. Les
Etats-Unis
Les EU ont mis en place un régime de
sanctions très dense, clairement lié à
l’absence de progrès du régime en matière
de démocratisation, de droits de l’homme et
d’éradication des drogues. En 1997, le gouvernement
Clinton a interdit les investissements américains en
Birmanie pour toutes ces raisons ; en 2003, le Président
Bush a déclaré que la Birmanie, avec Haïti et
le Guatemala, n’ont pas honoré leurs obligations
internationales en matière de drogue et n’ont pas
pris les mesures nécessaires à cet égard.
Depuis 1988, les EU ont suspendu toute assistance directe à
l’éradication des drogues et n’ont fait état
d’aucune coopération de la junte avec les instances
internationales à ce sujet. Toutefois, en 2002, pour la
première fois depuis 15 ans, le Département d’Etat
américain et l’ambassade américaine à
Rangoun laissaient entendre que Washington était sur le
point de reconnaître et ainsi certifier les efforts du
régime birman en matière d’éradication
des drogues. Cependant, les atteintes aux droits de l’homme
et l’impasse politique dans laquelle le pays est plongé
furent les facteurs déterminants du refus de
l’administration américaine de certifier des progrès
en la matière. Après l’attaque menée
contre le convoi d’Aung San Suu Kyi, le 30 mai 2003, le
Président américain a introduit dans la législation,
l’interdiction des importations de Birmanie, l’interdiction
des transactions financières avec la Birmanie et
l’interdiction pour les membres du régime birman de
pénétrer sur le sol américain. Cette nouvelle
loi lie les sanctions aux progrès démocratiques et à
l’extradition de Khun Sa, un des " roi de l’opium
" vers les EU. En 2003, les EU ont placé l’UNSWA
sur la liste des responsables du trafic.
2. L’Union
Européenne
L’UE a formulé sa
position dans sa Politique Etrangère et de Sécurité
Commune ; depuis 1996, cette position a été
renforcée à plusieurs occasion. Les mesures incluses
sont principalement un embargo sur les armes, une interdiction de
visa pour les représentant du régime et les
personnes ayant d’importants intérêts
commerciaux en Birmanie, ainsi que le gel de tous leurs avoirs en
Europe. A côté de cette position commune, des
programmes d’aide humanitaire ont toujours subsisté
afin d’assister les populations les plus pauvres. Malgré
les pressions exercées à l’ouest, la Birmanie
fut acceptée par l’ASEAN en 1997 ; en réponse,
les réunions UE-ASEAN furent suspendues jusqu’en
1999. L’UE a envoyé des délégations
officielles en Birmanie pour tenter d’établir un
dialogue politique avec le SPDC afin de promouvoir la
réconciliation politique et d’expliquer les
intentions de l’UE à l’égard de la
Birmanie. Par ailleurs, l’UE a également examiné
les possibilités d’augmenter l’aide humanitaire
vers la Birmanie, particulièrement au regard de l’épidémie
de VIH/Sida, sans lever ses sanctions. Après l’attaque
contre le convoi d’Aung San Suu Kyi le 30 mai dernier, l’UE
a renforcé sa position en étendant l’interdiction
de visa aux familles des membres du SPDC, aux députés
aux anciens ministres et aux officiers militaires. Leurs avoirs
furent également gelés.
3. L’ASEAN,
la Chine, l’Inde et le Japon
L’ASEAN
(Association of Southeast Asian Nations) a opté pour
une position différente, fondée sur "
l’engagement constructif " et la non-interférence
dans les affaires internes ; cette position a été
largement critiquée comme étant une excuse pour
légitimer les échanges commerciaux. Depuis son
entrée dans l’organisation en 1997, la Birmanie fut
le terrain de nombreuses divergences, spécialement suite à
sa condamnation par l’ASEAN après les évènements
du 30 mai 2003. Economiquement et politiquement, la Chine est
l’allié le plus stratégique du SPDC et son
principal fournisseur d’armes. L’influence
grandissante de la Chine en Birmanie est un problème
important pour l’Inde qui, depuis quelques années,
tente de renforcer ses liens avec le SPDC. Le Japon est le
principal fournisseur d’aide, mais depuis le 30 mai, tous
les programmes ont été suspendus.
a. l’impact
du trafic de drogue dans la région
Les problèmes
internes à la Birmanie sont devenus de plus en plus
inquiétants pour la région. L’épidémie
du VIH/SIDA ne peut être contenue dans l’enceinte du
pays et les drogues birmanes, qui étaient
traditionnellement vendues hors de la région, y sont de
plus en plus consommées, causant de nombreux problèmes.
La Chine, la Thaïlande et l’Inde qui, initialement,
faisaient figure de pays de transit sont aujourd’hui
d’importants marchés de consommation ; ces 3 pays ont
constaté une augmentation alarmante des personnes
dépendantes. Les flux d’opium, d’héroïne
et de méthamphétamines déversés à
travers la frontière birmano-thaïlandaise sont devenus
la principale préoccupation du gouvernement thaïlandais
en terme de sécurité. Depuis 1996, l’usage des
méthamphétamines en Thaïlande a
considérablement augmenté ; le marché était
estimé à 700 millions de pilules en 2002, ce qui
représente 10 pilule pour chaque homme, chaque femme et
chaque enfant. Les relations entre les 2 pays sont donc très
tendues lorsqu’il s’agit de drogue. La Thaïlande
accuse l’échec de la Birmanie en matière de
contrôle et le SPDC accuse la Thaïlande de soutenir le
SSA South. Cette situation a entraîné des conflits
frontaliers en 2001 et 2002, même si les relations se sont
récemment améliorées.
b. La lutte
thaïlandaise contre le trafic de drogue
Le 1er février
2003, le gouvernement thaïlandais a entamé une
nouvelle phase dans sa lutte contre la drogue, qui fut un succès
selon le Premier Ministre, Thaksin Shinawatra. Les organisations
de défense des droits de l’homme ont fortement
critiqué cette campagne, accusant les autorités
d’avoir orchestré une vague de meurtres entraînant
la disparition de 2300 présumés dealers pendant les
3 premiers mois de la campagne ; selon le gouvernement, ceci est
le résultat de disputes entre différents gangs. Il
est difficile d’obtenir des informations exactes sur ces
meurtres, tant la pression exercée sur les journalistes
d’investigation est importante ; toutefois, certains
laissent entendre que la plupart des victimes étaient de
petits consommateurs ou de petits dealers, constituant le socle de
la pyramide et non sa pointe. De plus, il est de notoriété
publique que les autorités thaïlandaises ont parfois
recours à des moyens coercitifs illégaux, et à
des unités de tireurs spéciaux. Suite à ces
nombreuses critiques, le gouvernement fit marche arrière et
les meurtres s’arrêtèrent ; au même
moment, le délai initial de 3 mois fut prorogé
jusqu’à la fin de l’année.
c. Les
mesures chinoises
Le trafic d’héroïne a
considérablement augmenté en Chine ; il semble
qu’une route traversant la Chine a remplacé les
routes de transit thaïlandaises, qui étaient les
principales voies d’accès des drogues birmanes vers
la mer et le reste du monde. En conséquence, de larges
quantités de drogue s’arrêtent en Chine,
entraînant une importante recrudescence du virus VIH/SIDA
chez les consommateurs de drogue par intra- veineuse. La demande
n’est plus uniquement basée dans les zones
frontalières, mais dans l’ensemble du pays ; le
marché chinois en perpétuelle expansion offre pour
les producteurs, de nouvelles opportunités. Dans la
Province du Yunnan, les saisie de drogue ont doublées entre
1995 et 2002. Après la révolution de 1949, la Chine
était parvenue à se débarrasser des opiacés
grâce à des lois sévères et aux
idéologies révolutionnaires. Aujourd’hui,
l’augmentation du virus VIH/SIDA dans la Province du Yunnan,
suite à la réouverture des échanges avec la
Birmanie est un problème considérable. D’autre
part, la Chine a toujours été très sévère
avec les trafiquants de drogue qui encourent la peine de mort ( en
1994, Yang Mouxian fut exécuté ; il était le
jeune frère d’un leader d’un groupe de
cessez-le-feu de la région de Kokang…) La Chine
s’est toujours montrée très déçue
du manque d’implication de la junte birmane en la matière
; elle est co-signataire du Projet de Développement
Alternatif Wa, et permet ainsi l’utilisation de ses réseaux
téléphoniques, de son système bancaire et de
son réseau routier pour le transport de marchandise.
Depuis, de nombreuses réunions régionales concernant
le contrôle des drogues furent organisées par la
Chine.
d. Les initiatives régionales en matière
de contrôle
De nombreuses initiatives de contrôle
des drogues ont vu le jour dans la région. Cela inclus le
Plan d’Action sub-régional de l’UNODC signé
par la Birmanie, le Vietnam, la Thaïlande, le Laos, la Chine
et le Cambodge qui vise à contrôler la production et
le trafic de narcotiques dans la région. On peut
également citer une initiative de l’ASEAN et de la
Chine, l’ACCORD (ASEAN and China Cooperative Operations in
Response to Dangerous Drugs) qui repose sur 4 piliers : attirer
l’attention des populations sur les dangers de la drogue et
les informer sur les solutions sociales proposées ;
construire un consensus et partager les meilleures expériences
de réduction de la demande ; renforcer les lois avec un
faisceau de mesures de contrôle ; et éliminer les
sources d’approvisionnement en encourageant les programmes
développement alternatif et la participation des
communautés à l’éradication des
cultures illicites. En 1998, la Birmanie était
co-signataire, avec les autres états de l’ASEAN, de
la déclaration commune pour une zone sans drogue au sein de
l’ASEAN d’ici 2015.
4. Les controverses
autour de l’aide humanitaire
La Birmanie souffre
d’une importante crise socio-économique, mais la
question de savoir s’il faut ou non envoyer de l’aide,
et si oui, par quel moyen, soulève d’importants
débats. Certains pensent que l’aide humanitaire
soutient et légitime le gouvernement militaire, puisqu’il
est impossible d’atteindre les populations dans le besoin.
Au contraire, les ONG internationales qui travaillent dans le pays
et qui sont assistées par de nouvelles organisations
locales pensent qu’il est possible d’aider les
populations et que leur présence permet aux ONG locales de
garder leur place. Par ailleurs, il semble injuste de punir les
populations dans le besoin pour les agissements de leur
gouvernement. La NLD défend la position selon laquelle
l’aide est la bienvenue si elle est transparente et destinée
aux populations. Ces dernières années, de
nombreux gouvernements et organisations internationales ont envoyé
des délégations en Birmanie pour examiner les
différentes manière de venir en aide au pays, même
si la plupart des aides furent suspendues après les
évènements du 30 mai 2003. Par ailleurs, après
la signature des premiers accords de cessez-le-feu, la plupart des
groupes armés ont privilégié le développement
social qui avait été négligé pendant
des années. Ils ont fait appel à la communauté
internationale pour obtenir de l’aide (ONU, ONG, etc.).
Néanmoins, le sentiment de frustration subsiste, tant la
communauté internationale est réticente à
envoyer de l’assistance ; cette dernière est tenté
d’attendre les progrès politiques de la part de
Rangoon, mais selon les travailleurs sociaux, il existe de
nombreux problèmes urgents qui ne pourront attendre ces
progrès et qui ne se trouveront pas résolus avec la
fin de la crise politique. Ce changement de position est également
entendu chez certains représentant birmans en exil, comme
M.Harn Yawnghwe. Ce n’est pas parce qu’on s’attaque
à la cause du problème, qu’on ne peut pas en
traiter les symptômes.
5. La drogue et le
VIH/SIDA
La Birmanie doit faire face à l’une
des plus sévères épidémies de HIV dans
toute l’Asie, due à la prolifération de
l’usage de drogue par intra-veineuse ; il y a environ 150 à
250,000 personnes qui consomment l’héroïne par
injection dont 63% sont infectées par le virus ( jusqu’à
96% dans certaines zones, le taux le plus élevé du
monde). Aujourd’hui, plus de 600,000 adultes et enfants sont
infectés par le VIH en Birmanie et les conduites à
risque sont toujours très répandues. (61% des
consommateurs par intra-veineuse partagent leurs seringues et
leurs aiguilles) En 2001, le gouvernement a reconnu le HIV
comme préoccupation nationale mais les moyens étaient
déjà mobilisées pour l’application des
lois sur les narcotiques qui imposent de nombreuses contraintes.
Le traitement pour les personnes dépendantes était
l’abstinence totale ; les thérapies de substitutions
ont été récemment examinée comme des
solutions possibles. Les peines pour consommation en Birmanie sont
très lourdes depuis que le gouvernement a criminalisé
la dépendance. Une personne dépendante doit
s’enregistrer auprès des autorités pour
prendre un traitement ; l’absence d’enregistrement ou
l’échec d’un traitement peut entraîner
une peine d’emprisonnement de 3 à 5 ans. Les "
délinquants " de la drogue constituent près de
70% de la population carcérale où la transmission du
HIV contribue largement à l’épidémie.
Les lois anti-drogues interdisent la production, la vente, ou
l’utilisation d’une aiguille hypodermique sans licence
qui peut être punie d’une amende et/ou de 6 mois
d’emprisonnement. Cette mesure contribue largement au
partage des aiguilles et fut théoriquement suspendue en
avril 2001.
6. Le soutien aux programmes de lutte contre
la drogue
Les Nations Unies ont mené des projets
d’éradication des narcotiques en Birmanie depuis les
années 1970 à travers l’UNFDAC (United Nation
Fund for Drug Abuse Contrôle) et plus tard, à travers
l’UNDCP qui opèrent sous l’égide de
l’UNODC. Les objectifs de ces projets sont divers : la
substitution des cultures, les programmes de développement,
les études sur l’opium, ou l’éducation.
L’UNODC est limitée par ses mandats aux questions
relatives aux personnes dépendantes, et à la
diminution des cultures par des projets de développement ;
elle ne peut intervenir dans les moyens de l’application de
la loi. Cependant, l’agence a été critiqué
pour ses carences en matière d’actions menées
contre les amphétamines. D’autre part, de petites
initiatives existent également, comme un petit projet de
l’UNDCP dans la région de Kokang jusqu’en 2002,
un petit projet financé par les EU dans le nord de l’Etat
Shan, et un effort japonais pour établir la culture du
sarrasin dans les régions de Kokang et de Mong Ko aisi que
dans le nord-est de l’Etat Shan. Par ailleurs, la Thaïlande
a accepté d’étendre ses propres projets
alternatifs au-delà de la frontière, dans le sud de
l’Etat Shan ; elle a fournit un effort de 440,000$ pour ce
projet transfrontalier. Les principaux bailleurs de fond des
programmes de l’UNODC en Birmanie sont les EU et le Japon,
suivis par l’Australie, l’Allemagne et l’Italie
qui y contribuent depuis 2002. En 2002, l’UNODC en Birmanie
a reçu 2,3 millions de $ ; les estimations des besoins pour
les 5 prochaines années font état de 26 millions de
$, principalement pour couvrir les dépenses
humanitaires. Toutefois, la controverse se poursuit entre les
partisans de l’aide et ceux qui souhaitent d’abord
constater des réformes. L’UNODC et ses donateurs
pensent qu’il est important de conduire ces programmes de
lutte contre la drogue pour des raisons tant humanitaires que
politiques. Selon le journal The Irrawady, la situation du
contrôle des drogues en Birmanie est un problème de
dimension nationale, régionale et internationale. Au niveau
humanitaire, l’insécurité alimentaire et la
propagation rapide du virus VIH/SIDA sont des facteurs
significatifs. Par exemple, 30% des cas de HIV officiellement
déclarés résultent de l’injection de
drogue. Au niveau politique, les drogues sont la cause
d’instabilités régionales et freinent la
réelle transition politique. Selon les critiques, le
SPDC est directement impliqué dans le trafic de drogue, au
niveau individuel ou institutionnel et ne fait aucun effort pour
une éventuelle éradication, si ce n’est
quelques gesticulations pour rassurer la communauté
internationale. Jusqu’à maintenant, certaines voix
n’ont jamais été entendues ; en se focalisant
sur l’Etat Shan, la communauté internationale a
ignoré les efforts en matière d’éradication
perpétrés par les groupes de cessez-le-feu comme le
KIO ou la NDK-A dans l’Etat Kachin ; ces groupes ont pour la
plupart, mené des actions dans leur zone sans faire appel à
l’aide internationale. De toute façon, ceux qui ont
lancé des appels n’ont pas été
entendus.
Toutefois, de nombreuses agences de développement
internationales se sont implantées en Birmanie et
parviennent à travailler directement avec les communautés
locales, sans interférences du régime. D’autres
organisations locales ont vu le jour et développent des
programmes alternatifs. Par ailleurs, l’imminence d’une
crise humanitaire due à la prohibition prévue pour
2005 force la communauté internationale à repenser
ses stratégies. Elle devrait développer une
politique qui soutient les fermiers victimes de la répression
de la junte et de la diabolisation des groupes de cessez-le-feu
par la communauté internationale. En effet, à
aucun moment les intérêts des fermiers cultivant
l’opium n’ont été représentés
dans les débats internationaux sur les politiques
d’éradication des drogues. Ils n’ont participé
à aucune étape du processus de décision des
stratégies anti- narcotiques qui ont un effet considérable
sur leur conditions de
vie.
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